Présentation
La châtaigneraie cantalienne touche à l’Aveyron par les communes de Lapeyrugue, Ladinhac, Leucamp et Vézels-Roussy. Ce pays est tout différent du Veinazès: son relief est sans cesse coupé, creusé et cisaillé car il subit l’influence du Goul, rivière mystérieuse dont nous dirons un jour l’énorme pouvoir de l’érosion.
Dans ces ravins du Goul et de son affluent le Maurs, les ruisseaux sont en nombre infini. La seule commune de Vézels-Roussy en compte 25: minces filets d’eau qui se gonflent après la pluie et dévalent des pentes vertigineuses garnies de hêtres, de chênes et de châtaigniers.
L’ensemble forestier le plus important de cette région est à cheval sur les communes de Teissières-Les-Bouliès et de Leucamp et se relie au bois de l’Amour sur le territoire de Vézels. On l’a appelé Forêt de Bioude du nom du hameau qui le limite au nord près du village de Canines. Une portion de ce massif (450 stères en 1827) était bois communal et fut prise en charge par un décret du 7 mars 1855 par les Eaux et Forêts pour une superficie de 95 hectares et 88 ares.
C’est la forêt de Leucamp. Elle seule nous intéresse ici et nous allons en retracer l’histoire depuis le début du XIX ème siècle n’ayant pu trouver de documents antérieurs.
Le bois mort et les seigneurs
La forêt de Leucamp est situé à une altitude moyenne de 650 mètres.Le peuplement est surtout du chêne (7/10) et du hêtre (1/10). Le reste est constitué par des noisetiers et des houx. Quelques sapins plantés récemment en bordure de la route près du col de Conquerol, sont d’une belle venue. La forêt s’étage sur des pentes de 30 à 35%.
Le sol est de médiocre qualité. Formé par la décomposition des micaschistes, il est maigre et sec et ne s’est enrichi que par l’apport séculaire formé par la décomposition des végétaux. On sait en effet qu’en bonne économie forestière le bois mort comme les feuilles doivent rester au pied de l’arbre où ils sont tombés; en se décomposant, ils retiennent l’eau de pluie et accroissent l’épaisseur d’humus où les bois futurs puiseront leur sève.
Les allemands étaient très sévères pour les délits forestiers. En France, les seigneurs faisaient porter leur préoccupation sur la chasse et ils avaient cédé aux communes en échange de certains services des droits d’usage variés: de faire paître le bétail, de couper les arbres pour les chars et les toitures, de ramasser le bois mort et les feuilles mortes.
Le droit de pacage
Dans les étroites clairières de la forêt de Leucamp, les habitants d’alentour avaient droit de laisser paître leurs bestiaux.
En 1828, le Conseil municipal de Leucamp décide qu’il sera payé cependant une redevance de 1 franc 50 par tête et que les troupeaux de chaque commune ou section de commune seront gardés par un ou plusieurs pâtres communaux. Si les habitants de communes usagères conduisent eux-même ou font conduire les bestiaux par d’autres gardiens, ils auront une amende de 2 francs par tête de bétail. Le Conseil nomme pâtre communaux Durand Laparra et Antoine Daudé.
Au printemps de 1829, quelques habitants de Prunet mènent pacager leurs bestiaux dans un commun. Le garde leur ayant demandé de se retirer, ils ont déclaré avoir des titres leur donnant ce droit et ils les ont remis en maire. On aimerait aujourd’hui avoir ces pièces précieuses.
En 1831, il est décidé que les bestiaux paieront 2 francs par tête; cette somme devant servir à régler le traitement du garde.
Les gardes
Depuis 1828, la forêt avait en effet un garde particulier. Il s’appelait Georges Chevalier, caporal en retraite, originaire de Saint Cernin, il touchait 200 francs de traitement. En octobre 1830, il est décidé qu’il ne sera même pas garde-champêtre. Le 23 mars 1831, Chevalier abandonne sa place et il est remplacé par Joseph Bersanges. Ce dernier est atteint de cécité en 1846 et le conseil nomme Géraud Perret dit Mathieu qui est révoqué en 1864 et remplacé à son tour par Antoine Baissac de Leucamp, ancien militaire de la campagne d’Italie.
Le régime forestier